Dialogues Interdits Épisode 4 Fine Mousse Contre Vieille Écorce
Dialogues Interdits, ou les conversations subversives et légères de deux personnages. Une série dhistoires complètes, dont les épisodes peuvent se lire dans nimporte quel sens.
Chaque samedi matin à 9 H, retrouvez un nouvel épisode de Théo Kosma.
Waouh, quel regard il vient de te faire ce gars
je crois que tu as fait une conquête.
Hem ! Jai cru sentir lombre dun sarcasme.
Il y a de quoi. Tu as vu sa bobine ?
Il est du quartier, je suis du quartier aussi
normal quon se connaisse un peu.
Je ne dis pas ! Mais on aurait dit la petite illade polissonne de lamant au lendemain dune nuit torride.
Cétait un peu ça.
Tu nes pas en train de me dire que tu as couché avec lui ?
Cest ce que je viens dentendre, si.
LUI ?
Tu ne rêves pas.
Je veux pas être méchante, enfin
tu es sûre de lavoir bien regardé ? Déjà, il doit avoir la bonne cinquantaine bien tapée.
Je ne lui ai pas demandé.
Il a au moins lâge dêtre ton père. Si pas ton grand-père.
Cest toujours difficile de savoir avec ce genre dhommes. Ils sont un peu comme des personnages de bande dessinée, à lâge indéterminable. Cest généralement le cas pour les gens qui ont souffert, qui ont de toutes petites vies pas bien folichonnes. Parfois ils ont quarante et en paraissent soixante, parfois linverse. De toute façon, jaime mieux ne pas savoir.
Tu regrettes ?
Pas du tout.
Je te trouve perverse.
Ah ? Et en quoi cest pervers ?
Je le vois dici
tu as croisé son regard, tu avais une envie pressante de baise, et tu tes dis « je vais me taper un petit délire. Je vais me farcir lhomme le plus repoussant du monde, juste pour lexpérience, juste pour voir ce que ça fait ».
Je ne dis pas que je naurais jamais pu penser ainsi
ton scénario est crédible. Ce qui ne lempêche pas dêtre totalement faux.
Vu son physique, je ne vois pas quel autre déroulement serait possible. Bide énorme, double menton, limite triple
jambes molles qui ressemblent à des jambonneaux
Il a des poches sous les yeux si grosses quon pourrait y mettre tout le contenu de mon sac. Une peau abîmée
presque plus de cheveux, et les rares quon trouve sont gris ou blanc. Il est tout simplement horrible. Tu me diras que jexagère, mais
Tu nexagères pas ! Au contraire, tu es en dessous de la réalité. Car toi, tu nas pas tout vu. Il a aussi des cicatrices, une langue râpeuse et jaunâtre, un vieux cul tout moche et poilu, quant au principal cest plutôt petit, flasque, et ça a bien du mal à se dresser correctement malgré toute lenvie quil avait de moi.
Tu te les donc bien tapé par perversité.
Pourquoi tu ne me laisses pas raconter ma version des faits plutôt que juger sans savoir ?
Pardon. Je ten prie, raconte.
Tes sûre ? Je sais pas.
Ça va, ça va
Raconte tout ! Je dis plus rien.
Finalement tu en meurs denvie que je raconte
La plus perverse des deux nest pas celle quon croit.
Si tu veux.
Je marchais en direction des bords de Marne, pour mon footing hebdo. Pas plus sexy que ça puisque jétais en jogging. Moulant, malgré tout. Je navais pas fait exprès ! Pour peu quon les prenne à la bonne taille, tous les joggings sont moulants.
Cest surtout que tu as un cul tellement moulé quil ressort avec quasiment nimporte quelle fringue.
Cest un peu exagéré, mais japprécie le compliment. Pour le haut, le t-shirt nétais pas top, un peu trop large. Enfin, ça a suffi pour le charmer. Ce nest pas si étonnant, car les mecs qui me regardent courir, jen croise beaucoup.
Ça te booste pour te dépasser ?
Au début ça me déconcentrait. Maintenant ça me booste.
Alors pourquoi tu nas pas pris de fringues de course encore plus sexy ?
Parce que jai déjà assez de regards comme ça
Bref ! Il ma fait un sourire, je lui ai rendu.
Alors que cest au fond dautre chose quil avait envie de jeter un il
Je ne sais même pas ! Je crois vraiment que cétait juste une parole gentille, gratuite.
Et désespérée ?
Non, juste altruiste. Ça ma beaucoup touchée. Pourtant, ce nétait pas la première fois quun vieux bourré, vieux clochard ou vieux tout court me sortait un truc de ce genre. Là, jai été très attendrie. Je me suis arrêtée, on a échangé un peu. Je me suis assise près de lui, je lui ai posé quelques questions. Ce quil aimait dans le quartier, ses endroits préférés
Vu quil navait pas de métier et peut-être aucune passion particulière, je ne savais pas trop quoi dire. On a parlé de la pluie et du beau temps.
Il ta pas raconté sa vie ?
Pas tellement. Je ne voulais pas lui demander. Je sais quil y a toujours des drames derrière. Un abandon des parents, de la maltraitance, de la drogue, du chômage, une séparation
Ces gens-là sont comme tout le monde. Ils ont eu une existence classique, et puis un jour un événement leur a fait péter les plombs. Je préférais ne pas le lancer sur le sujet. Au moins comme ça, la conversation a été détendue. Puis, je lui ai proposé de faire quelques pas. Il était enchanté.
Sur les bords de marne ?
Pendant très peu de temps. Rapidement, on a dérivé vers mon appartement. Il ma demandé où je lemmenais, je lui ai murmuré « ça vous tente de venir chez moi ? ». Le ton de ma voix annonçait clairement mon intention. Il hésitait.
À venir ?
Non, il hésitait entre y croire ou non. Il devait se demander si je ne voulais pas juste lui offrir un verre, un repas, quelques sous.
Vous êtes montés ?
Je lui ai dit de sinstaller, de faire comme chez lui.
Douche, repas et boisson ?
De façon très discrète et pudique. Il avait son sac à dos avec lui. Il sest enfermé dans la salle de bain et a changé de vêtements. Je dirais pas des vêtements ultra cleans, des vêtements mieux, disons. Et puis il a bu un jus dorange, sest fait deux tartines de confiture. À chaque fois il a demandé sil pouvait, même si je lui avais dit et redit quil pouvait tant quil voulait, que ce nétait pas la peine de demander.
Et puis
?
Et puis je lui ai demandé sil avait envie de partager un moment de tendresse en ma compagnie. Il a accepté, je lai invité sur mon lit. On sest câliné, longtemps lun contre lautre, sans rien faire dautre que senlacer, se serrer. Quelle tendresse, waouh ! Une douceur que jai ressenti avec très peu dhommes. Il sen est fallu dun cheveux quon en reste là.
Cest toi qui a fait le pas suivant ?
Oui, je lai embrassé, puis jai retiré mon t-shirt. Ce nest quà partir de là quil a compris quil pouvait.
Quil pouvait quoi ?
Quil pouvait tout. Me caresser, membrasser partout, me déshabiller entièrement. Cest ce quil a fait. Lentement, en prenant son temps.
À défaut de quelques sous, il a eu tes dessous.
Il sen est bien fichu ! Ce qui lintéressait, cest ce quil y avait
en dessous. Là, ça lui a beaucoup, beaucoup plu.
Et ensuite ?
Ensuite ? Que dire. Il ma pénétrée en position du missionnaire, ma léchée et caressée les seins, a accéléré, a éjaculé. Classique, quoi.
Il ta fait jouir ?
Bien sûr que non.
Il ta donné au moins un peu de plaisir ?
Cétait pas si mal. Le plaisir était surtout psychique. Jai beaucoup aimé partager avec lui ce petit moment de complicité. Physiquement il ny a pas eu aucun plaisir. Pas beaucoup non plus. Il na même pas songé à demander plus.
Ça lui a redonné envie ?
Il a aimé, une semi-érection est revenue, mais pas de second coup. Pas grave.
Eh ben dis donc, quelle histoire.
On devrait toutes faire comme ça, de temps en temps.
Tu veux dire, coucher avec les hommes qui ont des envies sans jamais avoir accès aux jeunes filles telles que nous ?
Le monde serait meilleur, si on le faisait.
Heureuse que tu parviennes à le faire. Moi je ne pourrais pas. Cest curieux que tes yeux pétillent autant en me racontant ça.
Pourquoi ?
Dhabitude quand tu me racontes tes aventures elles sont beaucoup plus originales.
Tu peux pas dire que ça ne létait pas !
Ce quil y avait autour létait. Une jeunette comme toi qui fait une proposition à un affreux tel que lui, ça narrive jamais.
Et cest bien ce qui est si triste.
Maintenant la suite des évènements
bon ben vous avez couché, quoi. Dune manière très classique, sans détail singulier ou excitant. Et même, plutôt des détails qui font pas rêver. Alors quest-ce qui ta autant plu ?
Le moment. Linstant présent. Tu ny étais pas, tu peux pas comprendre. Cest comme lorsque tu roules un patin à un amoureux. Cest déjà vu, ça se fait partout dans le monde des millions de fois à chaque seconde, et pourtant tu le vis comme un truc exceptionnel, que tu aurais envie daller chanter sous les toits.
Pour un patin avec un amoureux, daccord. Mais pour une baise molle avec un vieux
?
La magie de la complicité a joué. Le temps de quelques câlins, le fameux vieux est devenu un prince charmant et jai eu le sentiment de faire magnifiquement lamour avec lui.
Tu veux dire que ça va devenir un régulier ?
Je ne dirais pas ça. Peut-être quon couchera de nouveau ensemble
Si tu te mets à loucher sur les vieux tas, je ten présenterai. Dans mon quartier on les ramasse à la pelle.
Cruelle. Pourquoi ne vas-tu pas coucher avec eux, toi ?
Il y en a trop.
Et un seul. Pourquoi pas un seul ?
Il faudrait que jen ai le cran. Maintenant, ça nous mettrait sur un pied dégalité.
Allez, courage ! Jen vois justement un là-bas
lance-toi ! On est tout prés de ma rue, je te laisse mes clés. Je vois bien que tu en as envie, au final. Tu vas voir, tu seras surprise du résultat.
Joserai jamais.
Et si on allait toutes les deux ?
Ce serait drôle. Offrir à un vieux qui na rien pour lui ce dont rêvent tous les beaux jeunes hommes musclés quon croise.
Ce serait une belle revanche pour le vieux en question.
Allez viens ! On y va.
Je ne sais pas.
Pourquoi tu dis ça alors que tes pas se dirigent vers lui ?
Parce que je te suis.
Cest une excellente idée : suis-moi. Seulement je te préviens : il va falloir me suivre jusquau bout.
Vous en voulez encore ?
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